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Jardin d'enfant(s) - 2012

Cette pièce essaie de cerner un certain type d’homme, de bourreau si l’on veut, bien particulier et fictif – type que l’on méconnaît souvent, ou que l’on veut méconnaître… Elle essaie d’en prendre le point de vue, et la défense sans doute. Elle voudrait, d’une certaine façon, entrer dans les nuances du réel, et, en donnant voix libre à ce personnage, lui donner toute latitude d’exprimer ce qu’il est – donner à voir le monstre dans son humaine complexité, pour le coup, tel qu’il n’apparaisse pas un monstre et sans qu’on puisse dire quand il l’est vraiment. Il est vrai que ce dernier a une personnalité qui lui est propre, et un peu exceptionnelle. Il y aurait bien d’autres façons de l’aborder et de le rendre infréquentable. Le mot même de monstre étant un mot d’enfant, on ne s’étonnera pas d’ailleurs qu’il y ait encore en lui, et dans la pièce, quelques traces d’enfance… Ajoutons que cette pièce est une variation sur le désir ou le face à face amoureux, mais qu’elle utilise un langage singulier pour une situation non moins singulière. Jardin d’enfant(s) essaie de peindre la violence que peut induire un certain rapport - réel ou imaginaire - au désir, et son manque de contrôle, mais la légitimité aussi (car il faut la défendre) d’un tel désir. Dans quelle mesure le désir d’Hermann pour Alma est un crime, ou dans quelle mesure peut-on dire que tout désir est un crime, est une des questions que l’on peut poser à propos de cette pièce… Dans Jardin d’enfant(s), il y a ainsi quelque chose du crime passionnel, et c’est ce dernier terme qui rend supportable et aimable le premier, tant que les deux mots, crime et passion, sont ici presque liés comme des amants. Pour résumer, disons ainsi que la passion est sans doute le sujet premier de cette pièce. L’âge, et le désir dans la différence d’âge, en est un autre… J'aborde depuis deux pièces le thème de l'enfermement pour signifier une absence d’échappatoire. Si l’on n’échappe pas à autrui (parce qu’il l’a rendu impossible), échappe-t-on à soi-même ? Chacun en fait l’expérience, et connaît bien sûr la réponse. L’enfermement étant aussi la tentative qu’on peut se passer du monde, et, mieux, qu’on est rendu meilleur et pur de s’en passer : qu’advient-il si l’on s’enferme à deux, ou d’enfermer l’autre ? Cette tentative oblige à mesurer la modestie et la solidité de ses actes et de ses paroles, parce que le monde ne fait plus diversion, et que le moindre acte ou la moindre parole se décline dans la pleine conscience de son effort, de son courage, et, bien entendu, de ses illusions… Sur ce point – qui concerne éminemment le théâtre - il en va un peu de l’artiste comme du criminel… Pareillement l’auteur s’abstrait du monde, et le recompose selon son imaginaire. Qu’il y réussisse ou non, il n’ignore pas que le monde existe hors de lui, et ce qu’il lui doit. Ce sentiment est familier à tout auteur ; et l’enfermement est l’exil classique, pour qui, en premier lieu, ne veut pas être dérangé dans son désir, dissimuler peut-être ce désir, ou pour qui entreprend de suppléer le monde par la prison dorée de son imagination. ​ ​

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